Virilité n’est pas fertilité : le tabou qui brise les couples sénégalais

capacité d’un homme à engendrer des enfants est souvent confondue avec sa virilité, une méprise aux conséquences dramatiques pour les couples infertiles. Lors d’un webinaire organisé par la Fondation Merck, en partenariat avec la Première Dame du Sénégal et l’Association des journalistes en santé, population et développement (AJSPD), le gynécologue Moustapha Thiam a clarifié cette confusion : « On peut être viril… sans être fertile. »
« Beaucoup d’hommes croient que leur vigueur sexuelle suffit à prouver leur fertilité. C’est faux », a déclaré d’emblée le Dr Moustapha Thiam, président de la Société sénégalaise de médecine de la reproduction (SOSEMERE). Selon ce spécialiste, cette confusion culturelle constitue un frein majeur dans la lutte contre l’infertilité des couples.
Dans l’imaginaire collectif, un homme en bonne santé sexuelle, actif au lit et désireux de procréer ne peut être à l’origine d’un problème de conception. « Cette représentation viriliste est non seulement erronée, mais aussi injuste et dangereuse. Elle fait porter à la femme seule le fardeau de l’infertilité », explique-t-il. Pourtant, le Dr Thiam précise : « Dans 60 % des cas, l’homme est concerné par le diagnostic d’infertilité, soit seul, soit avec sa partenaire. » Les troubles de la fertilité masculine ne sont donc ni rares ni anecdotiques. « Il est temps de dissocier clairement la fertilité, qui dépend de la qualité des spermatozoïdes, de la virilité, une notion sociale, parfois purement symbolique », insiste-t-il.
D’un point de vue médical, la fertilité masculine peut être altérée par des infections sexuellement transmissibles non traitées, des traumatismes, des troubles hormonaux, la chaleur excessive (motos, saunas, bains chauds), la malnutrition, le stress, les drogues ou le tabac. « Mais peu d’hommes acceptent de faire un spermogramme. Certains refusent même de venir en consultation avec leur épouse. Et dans bien des cas, ils imposent une seconde union avant même d’avoir été testés », déplore le Dr Thiam. Cette attitude, ajoute-t-il, crée un double traumatisme pour la femme, qui souffre en silence, est culpabilisée, et souvent évincée ou stigmatisée dans le foyer.

Le Dr Thiam insiste sur l’importance de l’éducation et de l’information pour faire évoluer les mentalités. Il invite les hommes à comprendre que « fertilité ne rime pas toujours avec performance sexuelle » et que des examens simples peuvent éviter des années de souffrance dans les couples.

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