Affaire des 41,467 milliards sur le pétrole : Les dessous de l’offensive internationale de Woodside
Woodside a traîné le Sénégal, à travers la Direction générale des Impôts et Domaines (DGID), en arbitrage international, alors que la procédure déclenchée par elle-même devant le tribunal de Dakar est dans son dernier tournant.
Pour une notification de redressement portant le numéro 291/Dgid/DgE/Dbc/Bt en date du 8 novembre 2023, reçue il y a huit mois, Woodside aura attendu le mois de juin 2025 pour tenter de jouer un arbitrage. S’opposant donc en pleine procédure, cette option, vue par les autorités fiscales comme une manœuvre dilatoire, s’inscrit dans une bataille judiciaire engagée par la société australienne contre l’État du Sénégal.
Selon les informations obtenues par Libération, l’État du Sénégal a infligé à Woodside un redressement fiscal record, qui s’élève à plus de 41,467 milliards de FCFA. Le journal rapporte également que l’administration fiscale s’appuie sur huit chefs de redressement pour justifier cette somme, et les procédures ont été engagées depuis plusieurs mois.
Le dossier sera jugé le 19 juin prochain devant la juridiction compétente à Dakar. Toujours selon Libération, le chef de la Division du recouvrement de la Direction des grandes entreprises (DGE) avait saisi Woodside par une décision référencée 0030557/Mfb/Dgid/Dge/Dbt/Bf du 12 juin 2024, ordonnant le transfert immédiat de la somme de 1.466.186.567 FCFA du compte de Woodside auprès de Citibank vers celui de l’État.
Selon les documents consultés par Libération, la notification globale de redressement, datée du 8 novembre 2023 et signée sous la référence 0030538/Mfb/Dgid/Dge/Dbt/Bf, portait sur une somme totale de 41.467.543.147 FCFA. Cette procédure fiscale visait notamment les revenus financiers de Woodside qui, selon les autorités, ne bénéficient pas d’exonération au titre de l’article 48 du Code pétrolier.
Woodside conteste vigoureusement cette position. D’après la société australienne, tant que le projet n’est pas au stade de la production, il n’est pas logique d’appliquer le régime fiscal lié aux revenus pétroliers. L’entreprise soutient que les revenus visés – notamment les intérêts issus des dépôts bancaires et les pénalités de retard – ne peuvent être considérés comme des revenus pétroliers au sens strict du Code pétrolier.
Libération souligne aussi que Woodside invoque l’article 48 dudit Code, qui prévoit une exonération fiscale pour certaines phases du développement pétrolier. Mais pour l’administration fiscale sénégalaise, ces intérêts et produits financiers ne peuvent bénéficier de cette exonération, car ils ne sont pas directement liés à l’exploration ou à la production pétrolière.
Le fisc défend cette lecture en précisant que même si le champ de Sangomar n’était pas encore en phase d’exploitation, les flux financiers générés par l’opérateur – Woodside et ses partenaires, dont Petrosen – tombent bel et bien dans l’assiette de l’impôt sur les sociétés (IS) et l’impôt sur les revenus de valeurs mobilières (IRVM).
En réaction, Woodside a introduit une procédure d’arbitrage, contestant à la fois la base juridique du redressement et les méthodes de calcul. Toutefois, Libération précise que l’entreprise avait déjà versé une première tranche de paiement sous contrainte, ce qui pourrait affaiblir sa position en arbitrage.
À noter que ce litige s’inscrit dans un contexte plus large de surveillance accrue des sociétés pétrolières opérant au Sénégal. L’administration fiscale sénégalaise cherche à s’assurer que les entreprises multinationales respectent l’ensemble de leurs obligations fiscales, surtout en période d’exploitation active des ressources pétrolières et gazières.
senenews
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